La source tardive (la date d’impression est de 1609) utilisée pour restituer cette pièce prouve non seulement que la musique de Roland de Lassus est toujours appréciée au siècle suivant – il est mort en 1594 et il est d’usage de ne consommer généralement que de la musique “contemporaine” – mais que la vogue des bicinia, pièces à deux voix de registres égaux ou différents, continue elle aussi à avoir la faveur des chanteurs. Le bicinium est un genre que développèrent les musiciens pour apprendre aux enfants à chanter, à se débrouiller concrètement avec le solfège de l’époque (la solmisation). Ils le mettaient ainsi en pratique avec des pièces simples et adaptées au niveau des enfants, leur voix et l’objectif pédagogique à atteindre. Ce répertoire utilise souvent des chansons à la mode, des polyphonies à 4 voix à l’origine, et qui sont réduites à deux voix. On les trouve aussi bien en allemand, qu’en français ou en italien. L’utilisation de textes latins est en même temps l’occasion de familiariser cet “apprentif en musicque” avec les textes les plus usuels dans la culture religieuse d’alors.Cette pièce assez simple dans son écriture use néanmoins d’un contrepoint très ferme dans lequel l’imitation ou les règles élémentaires des figures du discours musical sont exprimées clairement pour l’entendement du chanteur et futur musicien peut-être.Oculus non vidit est proposé dans le mode d’origine (ré).